Une femme assez âgée, à l’expression douloureuse, demanda à son tour : « Que faire quand nos nuits sont sans sommeil ? » Lechaïm la regarda avec compassion puis prononça ces paroles :
Le sommeil n'est pas un hôte Que l'homme sollicite, Il n'est point complaisant Et sait être indocile, Si cela doit advenir. Mais qui dira que le dormeur Ne connaît que plaisir ? En vérité, nul ne saurait dire Si l'effroi est enfant nocturne De celui qui ne dort point, Et nul ne devra louer Celui que le sommeil emporte, Si telle est sa voie. Car l'apparence n'est pas le vrai : La veille n'est pas toujours tristesse, Et le sommeil ne donne pas joie A qui n'échoit pas la paix. Mais l'une et l'autre condition Se doivent alterner en chacun, Qui sans cela ne peut qu’errer, Car l'une nourrit l'autre, Et l'homme doit bénir les deux. Si cela n'est pas, scrute ton âme, Qui connaît les lieux obscurs Où naissent nos émois ; Sonde l’amertume de ton cœur, Ruine les rancœurs perfides, Renonce à la démesure Et demande à la Providence Le don de jours nouveaux.