Une femme aux yeux gris lui adressa alors cette demande d’une voix lasse : « Mon fils unique est malade depuis de longues semaines ; qui peut l’aider à guérir ? » Lechaïm plongea son regard dans le sien avant de répondre :
La maladie blesse le corps Et touche aussi l’âme, Celle de l’enfant sur sa couche Ainsi que le cœur de la mère, Qui espère la faveur des dieux. La chair est notre lot, Elle n’est pas tout le Réel, Car le visible et l’invisible Unissent leurs fils dans la trame De nos destins obscurs. La voix fervente de chacun, Mêlée de crainte ou de larmes Ne s’élève pas en vain vers le ciel, Si l’âme pleure aussi de gratitude En disant sa souffrance. La douleur seule n’est point féconde, Elle sonne comme un reproche A la face des dieux innocents, Car nul ne voudra détruire Ce qu’il a un jour appelé à la vie. Clame ta souffrance et ta joie De n’être point abandonnée, Malgré la peine qui t’étreint. Appelle les êtres d’en haut, Avec ferveur et amour, Certaine d’être entendue, Car déjà ils nous contemplent Et se tiennent auprès de nous. Ce que l’esprit peut obtenir N’est alors pas refusé, Si la supplique sans relâche Se répand sur la plaine. Oui, tout sera donné De ce qui peut l’être Dans la prison de notre chair, Car le Souffle va au souffle Et la Vie s’unit à la vie.